samedi 9 février 2013

P.2013.02.09. Ceci n'est pas un poème


Toute langue est un exil 
Je remarque soudainement les perce-neige sortis de terre – pas assez de terre, des dalles et du grillage autour
Pas la terre du bois d’où je les ai transplantés.
Le lendemain aussi : les perce-neige en fleur – doubles pétales, double corole : je ne vais pas l’écraser, leur corole,
Je ne vais pas les cueillir non plus – leur parfum me restera loin
Je vais me l’approprier en me le remémorant : ça marche !
Troisième jour : les perce neige du voisin – mort depuis deux ans –
Ont des coroles simples.
Quatrième jour : les perce-neige encore plus ouverts !
Un nerf les lie à mon père mort l’année dernière.
Un nerf noir, long, fil pas droit, entre mon père dans la terre, sous terre – en terre déjà ?
En kit ?  Malachite [1] ?
Les perce-neige, cette fin d’hiver, me tuent.

Je tarde à le dire : c’était il y a trois jours la dernière prise de vue.
Aujourd’hui : le nerf qui lie les perce-neige de mon père est si long
Que son fil pourrait faire le tour de la terre – de la sous-terre
Lier tous les morts entre eux – moi parmi eux déjà !




[1] « On appliquera la malachite sur les parties douloureuses.
Elle nous redonne confiance en soi, nous apporte plus de lucidité et fortifie nos facultés d'expression.
Elle accentue nos dons d'auto-guérison, affine la sensibilité, nos qualités de réceptivité, d'adaptation. » qu’ils disent.